Son nom est sur toutes les lèvres depuis Monza et les annonces des retraites de Felipe Massa et Jenson Button. Depuis, Lance Stroll, né le 29 octobre 1998 à Montréal, est en pole position pour un siège chez Williams. Le jeune pilote canadien, champion européen en titre de Formule 3, est fruit de tous les fantasmes des observateurs et des fans.


Un père passionné

Lawrence Stroll, un homme d’affaires Canadien qui a amené Ralph Lauren et Tommy Hilfiger, entre autres, au Canada et en Europe. Son business florissant en fait l’un des hommes les plus riches du Canada. En 2016, l’agence mondiale Forbes estimait sa fortune à près de 2.4 milliards de dollars Américains.

Lawrence Stroll est surtout connu pour son impressionnante collection de Ferrari, rentrant ainsi dans son inestimable patrimoine. Sa passion pour les voitures de courses remonte à l’adolescence et l’accroissement de sa fortune a fait d’un rêve du gosse, une réalité pour Stroll. Ne se contentant pas de regarder ses voitures dans un garage sous une bâche anti-poussière, Stroll les essaye également sur piste comme sur le circuit Mont-Tremblant dont il est propriétaire.

C’est dans cette atmosphère entre argent à foison et passion pour la marque au cheval cabré que nait et grandit Lance Stroll à cheval entre Montréal et Genève.

De Ferrari à Williams

En 2010, alors qu’il n’est encore qu’en karting, Lance Stroll intègre la Ferrari Driver Academy et est le seul pilote aussi jeune (11 ans) en karting à intégrer le programme des jeunes pilotes Ferrari. De plus, le fait que la famille Stroll soit établie, en Suisse, a aidé à cet accord que certains pourraient juger être prématuré.

Cet accord permet à Stroll de faire son entrée en monoplaces de la meilleure des façons avec la meilleure équipe du moment : Prema Powerteam. En 2014, à quinze ans, il entre avec l’écurie italienne dans le championnat Italien de Formule 4 qu’il remporte haut la main avec dix victoires en dix-sept courses. Stroll continue dans sa lancée avec la saison d’hiver des Toyota Racing Series qu’il remporte avec quatre victoires.

La suite logique veut qu’il soit promu en Formule 3 avec Prema, ce qui arrive en 2015 avec Brandon Maïsano, son coéquipier en F4 et son vice-champion en Toyota Racing Series. Cependant, le chemin s’annonce plus corsé que prévu pour lui. Stroll est dans l’ombre de Felix Rosenqvist et Jake Dennis dès le début de la saison et il est distancé parmi les débutants par Charles Leclerc et George Russell qui remportent tous deux une course dès le premier week-end à Silverstone. Il faut attendre la vingt-troisième course (sur trente-trois) pour que Stroll monte pour la première fois sur le podium général.

Ce manque de résultat, associé à la crise interne dans la Scuderia, pousse Lance Stroll à la porte du programme de jeunes pilotes après six saisons. Stroll ne met cependant que peu de temps à rebondir en annonçant, dès la fin de la saison 2015, son partenariat avec l’écurie Williams en tant que pilote de développement aux côtés d’Alex Lynn. (on remarquera au passage que Lynn a également été mis à la porte d’un programme de jeunes pilotes). Avec lui, Stroll emporta Luca Baldisseri, fondateur du programme en 2009 avec Jules Bianchi.

Ce changement de partenariat en F1 est stratégique. En effet, le moment où Felipe Massa déciderait de partir à la retraite ne faisait que tarder. Valtteri Bottas étant en pole position (en cas de catastrophe) chez Mercedes, Stroll se mettait ainsi en position extrêmement favorable pour rentrer en F1 d’ici 2019, lui laissant le temps d’acquérir l’âge et les points nécessaires pour la superlicence, et le temps de prendre l’avantage sur Lynn, pourtant plus expérimenté. Et cela passe par un changement radical d’image.

De Monza 2015 à Imola 2016

En effet, en arrivant chez Williams, Stroll avait fort à faire en terme d’image après une saison 2015 difficile. Cette image est née à Monza, lors d’un meeting qui restera dans les annales de la Formule 3. A la deuxième course, Stroll est victime d’un accident très spectaculaire dans la deuxième chicane, accident dont il a été reconnu coupable et qui a entrainé son exclusion de la troisième course – par ailleurs interrompue à cause des trop nombreux accidents.

Cette image ne s’est pas améliorée à Spa-Francorchamps où, à la deuxième course, alors en tête, il rentre en contact avec Mikkel Jensen et surtout avec Rosenqvist, ruinant leur course à tous les trois alors que Leclerc venait de prendre la tête du championnat. Cet incident impliquant un leader du championnat, qui plus est son coéquipier, agit comme un électrochoc pour Stroll. Après ces deux évènements, Stroll reprend tout du début et petit à petit, parvient à revenir dans le championnat. Alors qu’on les pensait intouchables, il parvient à remonter au championnat débutant sur Leclerc et Russell et passe même le Britannique pour finalement s’adjuger la cinquième place du championnat et sa première victoire à Hockenheim lors du dernier week-end.

2016 s’annonce sous de meilleures augures pour Stroll, qui devient le pilote numéro 1 chez Prema même s’il a notamment Maximilian Günther et Nick Cassidy comme coéquipiers. Le début de la saison peine à démarrer pour Stroll avec une seule victoire lors des dix premières courses et se retrouve derrière Günther et Cassidy au championnat. Néanmoins, chez Prema, lorsqu’un pilote est le numéro 1, tout est fait pour le faire gagner. Ainsi, Stroll remporte treize des vingt dernières courses, dont les cinq dernières consécutives. Sur ses quatorze victoires, la moitié sont des hat-tricks et il termine le championnat avec 507 points, soit 183 de plus que son dauphin Günther.

En moins d’un an, Stroll a réussi le tour de force d’avoir totalement changé l’image que les observateurs avaient de lui lors de sa première année en Formule 3. De pilote payant dangereux, il est devenu un pilote dominateur de son championnat, bien sûr grâce à Prema Powerteam, et apparemment prêt pour la Formule 1 à moins de dix-huit ans. Ce qui fait qu’il ne peut échapper à la comparaison avec un autre très jeune pilote qui est passé de la Formule 3 directement à la F1.

Un nouveau Verstappen ?

Lance Stroll devrait faire ses débuts en Formule 1 à dix-huit ans, quatre mois et vingt-huit jours au Grand Prix d’Australie et sera le deuxième pilote le plus jeune à prendre le départ d’un Grand Prix derrière Max Verstappen. La jeunesse est l’un des nombreux points communs que partagent réunit le Canadien et le Néerlandais. En effet la ressemblance entre les deux est frappante : tous deux ont un nom de famille connu dans le monde du sport automobile, tous deux font partie d’une filière de jeunes pilotes dès leur plus jeune âge, et tous deux ont fait le grand saut de la Formule 3 à la Formule 1.

Néanmoins, Stroll a un avantage de taille dans son cursus comparé à Verstappen : son expérience en monoplace. En comparaison avec le Néerlandais et son unique saison en Formule 3, Stroll compte une saison de Formule 4, deux de Formule 3 et une de Toyota Racing Series. En trois ans de monoplace, Stroll a su acquérir une maturité qui manque toujours à Verstappen en Formule 1, comme le dernier Grand Prix du Mexique l’a prouvé.

Certes Stroll n’a pas le talent d’un Verstappen et ne devrait pas avoir une carrière aussi flamboyante que le Néerlandais mais je pense que, même si la FIA n’avait pas rendu plus strict l’obtention de la superlicence, Stroll aurait tout de même attendu jusqu’à 2017 pour arriver en Formule 1, le temps de s’imposer en tant que pilote de pointe et multiple champion dans les catégories de promotion.

Il est certain qu’une ou deux années de GP2 n’auraient pas fait mal à Stroll en comparaison à Leclerc ou Russell dans sa génération, mais je suis convaincue, pour l’avoir suivi régulièrement ces derniers mois, qu’il est plus prêt pour la Formule 1 que ne l’était Verstappen il y a deux ans.

 

 

Nina Rochette pour FormulaRapida.net